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--> [ Nouvelles | Analyse détaillée du manifeste du Medef ]
Suite à l'envoi du communiqué de presse de la FFII-FR en réponse au manifeste sur les brevets du Medef, Jean-Michel Bertrand, député de l'Ain nous a envoyé le courriel ci-dessous. Il s'agit en fait de la réponse mal avisée que nous avons hélas coutûme d'entendre/lire de la part de membres de la majorité gouvernementale. Nul doute que cette "réponse standard" est inspirée par les tenants d'une brevetabilité illimitée en France et en Europe : l'INPI et les cabinets en propriété industrielle des grandes entreprises...
Monsieur, C'est avec une attention particulière que j'ai pris connaissance de votre courrier électronique du 5 juillet dernier, par lequel vous me faites part de vos remarques en ce qui concerne la politique française et européenne en matière de brevets logiciels, et je vous en remercie. La France ne semble pas s'être engagée dans une politique de généralisation des brevets logiciels. Un large consensus a émergé parmi les responsables politiques afin de restreindre de manière stricte le champ des « inventions mises en œuvre par ordinateur » brevetables. Le vote qui a eu lieu le 24 septembre 2003 au Parlement européen le confirme. Le projet de directive européenne portant sur la brevetabilité des inventions mises en œuvre par ordinateur n'a pas pour finalité d'étendre le champ de la brevetabilité mais, bien au contraire, d'en préciser les limitations, tout en restant respectueux des accords internationaux auxquels nous adhérons. Des ambiguïtés, présentes dans le projet initial élaboré par la Commission européenne, avaient motivé des réserves de la France vis-à-vis de ce texte. Lors du premier examen de ce projet de directive, le Parlement européen a voté des amendements significatifs. Certains d'entre eux corrigent le texte dans le sens approprié, à l'instar de ce qui avait été proposé par le groupe de travail des représentants des Etats membres. D'autres amendements introduisent des limitations plus drastiques au champ de la brevetabilité et des conditions plus limitatives aux critères de brevetabilité. En Europe, l'invention est brevetable si, relevant d'un domaine technologique, elle est nouvelle, implique une activité inventive et est susceptible d'application industrielle. Pour impliquer une activité inventive, une invention doit apporter une contribution technique. Ces critères sont bien plus restrictifs que ceux appliqués aux Etats-Unis où, en l'absence d'exigence de contribution technique, la jurisprudence a pu étendre le champ de la brevetabilité aux logiciels et méthodes d'affaires, ce qui n'empêche d'ailleurs pas le logiciel libre de s'y développer. En Europe, un logiciel en tant que tel n'est pas considéré comme une invention brevetable. Ne pourra l'être qu'une solution technique innovante apportée à un problème technique, solution qui peut être mise en œuvre par des moyens matériels ou logiciels. En l'absence de jurisprudence communautaire, de grandes divergences de jurisprudence ont pu apparaître entre Etats membres. L'intérêt d'une directive communautaire a été de permettre l'élaboration d'une jurisprudence européenne unifiée sur la base de critères explicites. Je me tiens à votre entière disposition pour vous apporter tout renseignement que vous jugeriez utile sur cette question. Je vous prie de croire, Monsieur, à l'expression de mes sentiments les meilleurs. Jean-Michel BERTRAND Député de l'Ain Maire de Bourg-en-Bresse