Le Mouvement des entreprises de France (Medef) vient de
rendre public un « Manifeste pour le brevet »
[ 1 ], sensééclairer les
entreprises françaises sur les bienfaits
économiques et sociaux du système de brevets.
Lorsque l'on connaît le pouvoir d'influence que ce
syndicat patronal possède auprès du
gouvernement français actuel, il nous a paru urgent
d'éclaircir ces positions à la lumière
des diverses analyses produites sur le sujet des brevets
dans le domaine du logiciel
[ 2 ].
En ce qui concerne les brevets logiciels, ce «
manifeste » du Medef prétend :
- éclaircir le cadre législatif du droit
des brevets et régler les fortes incertitudes
provenant du fait que les offices européens et
nationaux délivrent d'ores et déjà
des dizaines de milliers de brevets logiciels ;
- interdire les brevets sur les logiciels purs mais
permettre ceux sur « les nouveaux
procédés techniques ou les produits
industriels, même si leur mise en oeuvre fait appel
à des moyens logiciels ou inclut un logiciel
» ;
- minimiser les impacts de cette brevetabilité,
en niant les méfaits sur les logiciels libres, ou
par des licences « raisonnables et
non-discriminatoires », ou encore en augmentant les
moyens d'examen des offices de brevets.
Ces mesures ne sont pas sans rappeler les explications
données par les Ministres français
immédiatement après la décision du
Conseil de l'UE du 18 mai 2004 qui avait annulé les
limites que Parlement Européen avait imposées
à la brevetabilité des logiciels. Mme
Haigneré, Ministre déléguée aux
affaires européennes et Mr Devedjian, Ministre
déléguéà l'Industrie avaient
alors publié un communiqué de presse
[ 3 ] confus essayant de justifier leur
adhésion à cette décision.
Or cette position n'est pas étonnante de la part
des « experts en brevets » du MEDEF qui ont
rédigé ce manifeste. En effet, ceux-ci sont
de longue date de fervents défenseurs des brevets
logiciels
[ 4 ]:
- Christian Nguyen est responsable de la
propriété intellectuelle chez
Thalès. Prétendant que les brevets
logiciels étaient bénéfiques pour le
PME, il a déjà déjà
déclaré qu' « il n'y a pas de
spécificité du logiciel par rapport aux
autres industries. »
- Thierry Sueur est vice-président chargé
de la propriété intellectuelle à Air
Liquide et ancien responsable de la
propriété intellectuelle de Thomson
Multimédia. Présent dans presque tous les
débats et consultations sur les brevets logiciels,
il prétend représenter l'Industrie. Il a
déjà déclaré que « tous
les logiciels sont brevetables. La brevetabilité
est intimement liée à l'innovation.
». Depuis le 21 avril 2004, il a été
nommé« membre du conseil d'administration
de l'Institut national de la propriété
industrielle, représentant les milieux industriels
intéressés à la protection de la
propriété industrielle. »
On retrouve ces deux auteurs derrière toute la
propagande pro-brevets logiciels en France. Leurs
précédentes prises de position prouvent
qu'ils savent parfaitement ce qu'ils veulent : une
brevetabilité illimitée du logiciel. Le fait
qu'ils prétendent ne pas vouloir breveter les
logiciels en tant que tels mais seulement « les
inventions mises en oeuvre par un programme d'ordinateur
» est le stratagème habituel de ceux pour qui
cette novlangue désigne en fait tout logiciel
exécuté sur un ordinateur,
c'est-à-dire tous les logiciels.
Le fait qu'ils fassent étrangement
référence au logiciel libre dans un document
du Medef, tout comme les ministres français, tend
à montrer qu'ils agissent volontairement pour
orienter les décideurs maintenant quant à la
directive « brevets logiciels ».
On est en droit de se demander si cette belle
supercherie, dont les auteurs sont coutumiers, n'a pas
directement influencé le vote de la
délégation française au Conseil des
ministres du 18 mai 2004, acceptant le « compromis
» de la Présidence irlandaise et de la
Commission européenne satisfaisant ainsi les
intérêts des cabinets en
propriété industrielle des grandes
entreprises, mais également les membres de l'INPI,
dont on sait que les administrateurs siègent au
Groupe de travail sur la Propriété
intellectuelle du Conseil qui a préparé la
proposition de « compromis »
[ 5
].
Il importe que les responsables d'entreprises
informatiques ne se laissent pas abuser par cette position
mais suivent plutôt les experts de leur domaines,
tels la CEA-PME, Confédération
européenne des associations de petites et moyennes
entreprises, ou Object Web, Consortium pour une
architecture d'intergiciels libres, comptant parmis ses
membres de grandes entreprises, qui ont tous deux
signé récemment un Appel urgent aux
gouvernements et parlements nationaux
[ 6
].
Récemment, le Parlement néerlandais a
déjugé le vote de son Ministre
[
7 ] au Conseil du 18 mai 2004. La FFII appelle les
députés français à faire de
même pour ne pas laisser la démocratie et
l'industrie informatique françaises aux seules mains
de ceux qui ont un intérêt à ce que la
brevetabilité soit étendue à tous les
logiciels.
L'Association pour une infrastructure de l'information
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enregistrée à Munich, ayant pour objet de
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Plus de 400 membres, 1000 sociétés et 60000
adhérents ont chargé la FFII de
représenter leurs intérêts dans le
domaine de la législation sur les droits de
propriété attachés aux logiciels.