Article de l'Association pour une infrastructure de l'information libre (FFII) : URL originale
L'avis signé par les dirigeants des gouvernements régionaux de toute l'Europe avertit que le système de brevets n'est pas universellement applicable et en particulier ne devrait pas être étendu aux logiciels.
Étude sur les Brevets Logiciels effectuée par des chercheurs britanniques à la demande de la Direction Générale pour les Entreprises de la Commission Européenne. Les résultats de cette étude sont partiellement fondées sur le projet ESRCIP (voir ci-dessus). Son propos est de découvrir comment les PMEs de logiciels traitent des droits sur la Propriété Intellectuelle en général et des brevets en particulier, combien utiles sont les brevets pour elles et ce qui peut être fait pour augmenter la prise de considération des brevets. L'étude a trouvé que nous ne sommes pas dans une "ère pro-brevet" mais plutôt dans une "aire pro Droits de Propriété Intellectuelle", et que les brevets logiciels ne sont pas beaucoup appréciés des PMEs et probablement pas d'une très grande aide pour elles.
Étude commandée par la DG Marché intérieur à un "réservoir à pensées" (think-tank), basés à Londres, d'avocats des brevets bien connus pour leur soutien actif aux brevets logiciels. Apparemment en réaction à la pétition d'Eurolinux, l'étude juridique initiale a été renommée pour devenir une "étude sur l'impact économique" et un économiste a été recruté pour écrire le chapitre sur l'économie, qui cependant n'a pas débouché sur les conclusions espérées par la Commission. L'étude a donc été mise sous clé pendant 6 mois avant de devenir la base d'un processus de consultation.
Il n'existe aucune preuve que les effets positifs découlant de la possession de brevets logiciels l'emportent sur les profondes inquiétudes suivantes :
Après une décision inattendue des gouvernements nationaux de s'abstenir de changer l'article 52 de la Convention sur le brevet européen (CBE), la Commission a annoncé un autre "processus de consultation". Les consultations précédentes n'avaient impliqué que le groupe des confrères de l'Unité Propriété industrielle, i.e. environ 40 avocats des brevets, et n'avaient posé que des questions adaptées à ce groupe de confrères. La nouvelle consultation a été conçue de la même manière mais, à cause du dégré d'attention publique plus élevé que le processus avait atteint entre temps, elle a reçue environ 1500 réponses provenant d'origines auxquelles elle ne 'attendait pas.
Quel pourcentage de participants appartenant aux groupes suivants était contre les brevets logiciels :
Particuliers | 98.5% |
---|---|
PME | 95% |
grosses enterprises | 81% |
Associations | 45% |
Utilisateurs | 99,6% |
Étudiants | 99,5% |
Universitaires | 98,0% |
Développeurs de logiciels | 95,8% |
Professionels des brevets | 33% |
Gouvernements | 22% |
Il ressort de ceci que les administrateurs gouvernementaux des brevets sont encore plus fortement partiaux en faveur des pratiques de l'OEB que ne le sont les grosses entreprises et les avocats des brevets. Cela ne surprend personne puisque les pratiques de l'OEB ont été amenées par ces mêmes personnes, qui représentent leurs gouvernements au Conseil d'administration de l'OEB et au Groupe de travail sur les brevets du Conseil.
La Commission a conclu à partir des déclarations de certaines associations telles que l'EICTA ou UNICE, dont la politique en matière de brevets est conduite par les avocats en brevets de grosses entreprises, qu'une "majoritééconomique" était en faveur des brevets logiciels. Cependant, les 2/3 des emplois et des taxes perçues dans le secteur du logiciel proviennent des PME, dont très peu ont intérêt à breveter.
voir aussi La "majoritééconomique" dans le débat sur les brevets logiciels
Enquête menée parmi plusieurs centaines d'entreprises par l'Institut Fraunhofer pour la recherche sur l'innovation et l'Institut Max-Planck sur la propriété industrielle, commandée par le département des brevets du Ministère de l'économie allemand, tous ayant un fort parti pris pro-brevets, révélant pourtant les résulats suivants :
La Commission allemande sur le monopole (organe d'observation de la concurrence attaché au Ministère de l'économie) soulève des inquiétudes quant aux récentes pratiques dans les offices et tribunaux de brevets consistant à accorder des brevets logiciels, critique ces pratiques comme étant illégales et dangereuses pour l'innovation et la concurrence.
Un rapport du Commissariat général du plan en France sur l'économie du logiciel, publié le 17/10/2002, donne des chiffres sur l'industrie du logiciel en France (270 000 employés, chiffre d'affaires de 31,6 Mds d'euros en 1999), considère que l'économie du logiciel de la France est handicapée par les standards propriétaires et les dangers des brevets et recommande que les algorithmes et les méthodes d'affaires ne soient pas brevetables; que les formats et standards en soient exemptés et que les brevets sur des inventions techniques utilisant des logiciels soient limitéà une durée de 3 à 5 ans.
La Commission fédérale du commerce (Federal Trade Commission, FTC) des États-Unis a conduit des auditions parmi les sociétés informatiques qui ont montré une animosité incessante de l'industrie étasunienne du logiciel envers les brevets logiciels. Au cours de précédentes auditions en 1994, de grandes entreprises telles qu'Adobe, Oracle ou Autodesk avait exprimé une forte opposition à la brevetabilité du logiciel. Cette fois, Robert Barr, vice-président à la tête de la propriété industrielle de Cisco Inc., sociétéà la pointe des technologies internet, que beaucoup voient comme un modèle de gestion moderne de l'innovation, a déclaré :
[...]
Le temps et l'argent que nous dépensons dans les dépôts des brevets, les poursuites judiciaires, la maintenance, les contentieux et opérations de licence pourraient être mieux dépensés dans le développement de produits et la recherche conduisant à davantage d'innovation. Mais nous déposons chaque année des centaines de brevets pour des motifs sans rapport avec la promotion ou la protection de l'innovation.
[...]
Plus encore, l'accumulation de brevets ne résoud pas vraiment le problème de l'infraction involontaire de brevets par le développement indépendant. Si nous sommes accusés d'infraction par un détenteur de brevet qui ne fabrique ni ne vend de produits ou qui vend des produits en beaucoup plus petite quantité que nous, nos brevets ne valent pas assez pour l'autre partie pour la dissuader d'attenter un procès ou pour réduire la somme d'argent exigée par l'autre société. Ainsi, au lieu de récompenser l'innovation, le système de brevets pénalise les sociétés innovantes qui réussisent à mettre sur le marché de nouveaux produits et il subventionne ou récompense ceux qui n'y arrivent pas.
Le rapport final de la FTC, publié en octobre 2003, est arrivéà la conclusion que le système de brevets stimulait la concurrence et la productivité dans certains domaines (la pharmacie est citée en exemple), alors qu'il avait tendance à causer du tort dans d'autres domaines, particulièrement lorsqu'il s'applique aux logiciels et aux méthodes d'affaires. Le raport émet des doutes quant au bon sens des décisions de justice passées admettant la brevetabilité dans ces secteurs et propose une serie de mesures pour réparer certains des dommages occasionnés. Les positions exprimées durant les auditions sont ainsi résumées :
Un rapport du plus grand investisseur financier dans les PME allemandes recommande comme l'une des quatre "mesures urgentes pour renforcer l'innovation et la croissance économique en Allemagne" :
Depuis 1998, L'Office européen des brevets (OEB) a accordé des revendications de programmes, i.e. des revendications sous la forme :
Depuis 1986, l'OEB a accordé des revendications de procédé sur des objets où la seule réalisation "inventive" réside dans du traitement de données et pour laquelle des revendications de programmes auraient donc été plus simples et directes.
En d'autres termes : à chaque fois qu'une réalisation prétendument nouvelle pour laquelle on recherche une protection par un brevet tombe dans la portée d'une réclamation de programme, elle n'est pas brevetable..
voir aussi Art 52 CEB: Interprétation and Révision
La proposition de la Commission européenne utilise la définition de l'OEB, alors que le Parlement européen a redéfini le terme dans un sens opposé : des inventions techniques (solutions d'ingéniérie impliquant les forces de la nature) mises en oevre par un ordinateurs. Le Groupe de travail du Conseil a encore une autre définition qui inclut à la fois les inventions techniques et les innovations logicielles.
voir aussi Pourquoi le logiciel -- en particulier le logiciel embarqué -- ne devrait pas être brevetable et FFII interests and the EU Software Patent Directive
La référence aux "forces de la nature" est omniprésente dans le droit des brevets traditionnel de l'Europe de l'est et de l'Asie orientale. Elle apparaît dans la jurisprudence, particulièrement en Allemagne mais également aux États-Unis, en France et dans d'autres tribunaux.
Rendre les choses faciles est peut-être moderne mais est-il également moderne de breveter les choses faciles ?