Conseil 18/05/2004 : une majorité non-qualifiée

Article de l'Association pour une infrastructure de l'information libre (FFII) : URL originale

Les présidents de séance à la session du Conseil sur la compétitivité ont poussé les participants à accepter la proposition avec des manoeuvres trompeuses et pressantes les prenant par surprise, rendant même ainsi discutable la certitude qu'une majorité valide avait été obtenue. On peut affirmer avec certitude que seule une minorité de gouvernements a réellement accepté ce qui était négocié, mais que plusieurs gouvernements étaient mal représentés par leurs négociateurs, qui ont rompu des accords intra-ministériels ou ont même enfreint les consignes de leurs supérieurs.
Manoeuvres trompeuses pour gagner les autres pays à la position de Bolkestein, accord inter-ministériel rompu, les députés nationaux de la coalition dirigeante et de l'opposition protestent contre le fait d'avoir été mis à l'écart et trompés.

Les dirigeants politiques des deux partis gouvernants, Sociaux-démocrates et Verts, ont condamné l'attitude des fonctionnaires des brevets du gouvernement, soulignant que ces fonctionnaires avaient trahi les promesses données à un groupe de travail des membres de la coalition au parlement.

Le premier ministre avait promis de ne pas soutenir la proposition, le représentant au Conseil l'a soutenue malgré tout, expliquant par la suite que leur fax avait eu une panne pour recevoir les instructions.
Le représentant avait comme consigne de suivre l'amendement allemand à l'article 2b, on ne lui pas demandé sa position car la majoritéétait supposée être déjà atteinte. Par la suite, il a déclaré que la Pologne avait l'intention de s'abstenir.
Le ministre était absent, le diplomate ne savait pas quoi faire, on a assisté au dialogue ubuesque suivant :
Présidente de séance irlandaise:
Belgique : abstention.

Et le Danemark ? Puis-je entendre le Danemark, s'il vous plaît ?

Danemark:
J'aimerais vraiment demander à la Commission pourquoi ils ne pouvaient pas accepter la dernière phrase proposée par les Italiens et qui était dans la proposition allemande originale.
Irlande:
Je pense que le Commissaire a déjà répondu à cette question. Je suis désolé, le Danemark. Alors êtes-vous pour, contre ou abstention ?
Danemark:
Je pense que nous ne, nous ne sommes pas cont...
Irlande:
Je considère que c'est un "oui".
Danemark:
Nous ne sommes pas content
Irlande:
Êtes-vous content à 80% ?
Danemark:
Mais... Je pense que nous...
Irlande:
Nous n'avons pas besoin que vous soyez complètement content. Aucun de nous n'est complètement content.
Danemark:
Oh, je sais cela, je sais cela.
Irlande:
Si nous l'étions, nous ne serions pas ici !
Danemark:
Je pense que nous ne sommes pas très content, mais je pense que nous, que nous...
Irlande:
Merci beaucoup.
Danemark:
... nous aimerions voir un solution aujourd'hui.
Irlande:
Merci beaucoup le Danemark.

Mesdames et messieurs, je suis heureuse d'annoncer que nous avons une majorité qualifiée, merci donc à tous, vraiment, et merci au commissiaire Bolkestein.

Le ministre Brinkhorst, en faisant confiance à son "expert en brevets" ministériel, a mal informé le parlement néerlandais à plusieurs reprises et a agi contre la demande du parlement. Ceci a conduit à de graves questions de la part du parlement qui a demandé que le soutien des Pays-Bas soit rétracté. L'une des excuses de Brinkhorst pour avoir donné de mauvaises informations au parlement a été qu'une "erreur de traitement de texte" s'était produite, de manière similaire à la panne de fax des Hongrois.
Soutien en contradiction avec les précédentes promesses des gouvernements.

Le ministre luxembourgeois avait promis de s'opposer si l'article 6 bis du Parlement, pour lequel ses diplomates s'étaient battus, n'était pas accepté. Bien que la proposition du Conseil stipule dans son considérant 17 l'exact opposé de ce que le Luxembourg affirmait supporter, le ministre a néanmoins accepté le "compromis".

La situation est la même en Estonie, en Lettonie et en Slovénie

En Slovenie "l'Office de la Propriété intellectuelle" avait promis au ministère de l'Information de soutenir les modifications allemandes mais les a abandonnées en suivant l'Allemagne.

Les ministres ont agi contre les promesses qu'ils avaient données au président et ont fait des déclarations fantoches sur ce qu'ils allaient voter.

Les ministres ont capitulé devant la persévérance des "experts en brevets" de l'INPI qui ont continuellement essayé de leur faire prendre des vessies pour des lanternes. La Ministre déléguée aux affaires européennes, Claudie Haigneré a déclaré que le compromis du Conseil n'autoriserait que la brevetabilité d'inventions techniques et pas celle de logiciels bureautiques, ce qui est à l'évidence erroné.

La situation dans la plupart des pays est la même : les ministres ont manqué de vigueur pour défendre les intérêts publics contre une succession de pressions et de mensonges de leurs offices des brevets qui, par défaut, s'occupaient du dossier au "Groupe de travail sur l'Escroquerie intellectuelle".

La proposition du Conseil va de manière significative au-delà de celle de la Commission en autorisant les revendications de programmes. Il s'agit également à tout égard d'une proposition pour une brevetabilité illimitée et une application des brevets sans entraves, plus extrémiste et dénuée de compromis que toute proposition jusqu'ici. Bolkestein a néanmoins tenté de vendre cette proposition à ses collègues comme "maintenant l'équilibre de la proposition initiale". Cela a apparemment suffi à influencer Liikanen.

voir aussi CEC patent officials 2004-04-28 pushing for program claims

Bolkestein s'est d'ailleurs donné beaucoup de peine à la session du Conseil pour exploiter les formulations trompeuses du "texte de compromis" que la délégation allemande avait si rapidement acceptées :

La Commission a débattu assez longuement de la possibilité qu'un programme d'ordinateur en tant que tel puisse ou doive être brevetable et s'est prononcée contre. Et pour que cela soit absolument et parfaitement clair, la Commission aimerait introduire deux amendements à l'article 4 bis, qui est intitulé "exclusions de brevetabilité". La Commission aimerait proposer une nouvelle première partie à cet article 4 bis, et cette nouvelle première partie se lit simplement : "Un programme d'ordinateur en tant que tel ne peut constituer une invention brevetable". Cela ne peut être plus clair et devrait apaiser les appréhensions de toutes sortes que, par magie, un programme d'ordinateur en tant que tel puisse après tout devenir brevetable ; laissez-moi le lire encore une fois par souci de clarté : "Un programme d'ordinateur en tant que tel ne peut constituer une invention brevetable".

L'annexe A explique dans les faits la "magie" de la Commission. Selon la magie de Bolkestein, seule une revendication étroite est une revendication sur "un programme en tant que tel", alors qu'une revendication étendue, caractérisée non par une expression individuelle spécifique mais par une sorte de "contribution technique" indéfinie est un programme "qui n'est pas en tant que tel". Ou comme l'affirme l'article 5(2) :

Une revendication pour un programme d'ordinateur... n'est autorisée que si [condition qui peut toujours être remplie].

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