Article de l'Association pour une infrastructure de l'information libre (FFII) : URL originale
L'article 27 a souvent été analysé par les juristes des brevets comme impliquant que les revendications de programmes devaient être autorisées pour s'étendre aux programmes d'ordinateur.
Paul Hartnack, Inspecteur général a l'Office des Brevets Britannique, a commenté cette question dans une audition à Londre en 1997 :
Un fragment de pur logiciel constitue-t-il une invention ? La loi européenne dit que non.
Le logiciel pur constitue-t-il une technique ? Nombreux sont ceux qui pensent que non.
Est-il susceptible d'application "industrielle" ? Ici encore, pour beaucoup de logiciels nombreux sont ceux qui diraient que non.
Les ADPIC sont une occasion de renforcer la protection du logiciel. Mais la décision d'un tel renforcement doit être prise en se fondant sur des arguments économiques réfléchis. Est-ce l'intérêt de l'industrie européenne et des consommateurs européens de faire un tel choix ?
Dans sa ratifications des accords du GATT et ADPIC, les instances législatives allemandes n'ont pas vu de contradictions entre les sections 1(2)(3) and 1(3) de la Loi sur les brevets et l'article 27(1) des ADPIC.
Dans une décision en 2000, dans laquelle elle rejetait une revendication sur un programme d'ordinateur, la Cour fédérale allemande sur les brevets a réfuté explicitement la supercherie des ADPIC :
La Court fédérale des brevets se réfère ici à la doctrine de Dispositionsprogramm, selon laquelle la présence ou non de forces contrôlables de la nature dans la solution du problème est le seul critère valable pour délimiter le domaine des inventions brevetables. Selon cette doctrine, le traitement de données n'est pas un domaine technique, comme l'explique Gert Kolle, le plus grand spécialiste contemporain de la question , dans son analyse souvent citée de la décision Dispositionsprogramm en 1977:
C'est exactement ce qu'a fixé le Parlement européen dans sa proposition de directive amendée:
Article 2b.
"contribution technique" , également
appelée "invention", désigne une
contribution à l'état de la technique dans
un domaine technique. Le caractère technique de la
contribution est une des quatre conditions de la
brevetabilité. En outre, pour mériter un
brevet, la contribution technique doit être
nouvelle, non évidente et susceptible
d'application industrielle. L'utilisation des forces de
la nature afin de contrôler des effets physiques au
delà de la représentation numérique
des informations appartient à un domaine
technique. Le traitement, la manipulation et les
présentations d'informations n'appartiennent pas
à un domaine technique, même si des
appareils techniques sont utilisés pour les
effectuer.
Article 3a.
Les États membres veillent à ce que le
traitement des données ne soit pas
considéré comme un domaine technique au
sens du droit des brevets et à ce que les
innovations en matière de traitement des
données ne constituent pas des inventions au sens
du droit des brevets.
Sous réserve des dispositions du paragraphe 4 de l'article 65, du paragraphe 8 de l'article 70 et du paragraphe 3 du présent article, des brevets pourront être obtenus et il sera possible de jouir de droits de brevet sans discrimination quant au lieu d'origine de l'invention, au domaine technologique et au fait que les produits sont importés ou sont d'origine nationale.
Il faut noter que le texte encourage explicitement à distinguer les interprétations de termes abstraits employés, tels que "non évidence" and "application industrielle".
Alors que le paragraphe interdit la "discrimination" dans l'intérêt de conditions favorables à l'échange libre et égalitaire, il ne stipule aucun concept spécifique d'invention. Il pourrait toutefois être interprété en faveur d'un concept d'invention qui serait favorable au libre échange et au développement économique dans lesquels les termes "technologie", "industrie", etc. sont lourds de sens.
Même à l'intérieur des limites du domaine des "techniques" brevetables, l'article 27(1) peut difficilement être interprété comme un cadre rigide proscrivant tout règlage fin. S'il devait être interprété aussi rigidement, comme certains avocats des brevets le propose, la loi des USA sur le copyright enfreindrait les ADPIC dans au moins trois domaines : les produits pharmaceutiques [35 USC 155,156, extension du terme; 35 USC 271(e), utilisation expérimentale]; les procédés biotechnologiques [35 USC 103(b), fournir un standard de non évidence particulier]; les procédures médicales et chirurgicales [35 USC 287(c), limiter les remèdes] et les méthodes d'affaire [35 USC 273(a)(3), fournir des droits antérieurs aux utilisateurs].
Cette clause est citée par les lobbies des détenteurs de brevets dès que quelqu'un essaie de restreindre leurs droits, que ce soit de manière "raisonnable" ou "non".
voir Interopérabilité et Brevet: Controverse au Parlement européen
Les rédacteurs de l'accord étaient au courant de ces problèmes. Dans les Dispositions générales, ils ont inclus des articles tel que celui-ci :
Objectifs
La protection et le respect des droits de propriété intellectuelle devraient contribuer à la promotion de l'innovation technologique et au transfert et à la diffusion de la technologie, à l'avantage mutuel de ceux qui génèrent et de ceux qui utilisent des connaissances techniques et d'une manière propice au bien-être social et économique, et à assurer un équilibre de droits et d'obligations.
Article 8
Principes
Il est bien connu que les brevets logiciels sont un désastre en termes d'innovation, de concurrence et d'équilibre des droits. Plus encore, les brevets sur les méthodes pour l'exercice d'activités économiques servent systématiquement à restreindre les échanges et ces restrictions sont jugées inacceptables par la plupart des gens de ce secteur.
Les ADPIC fournissent des méta-règles pour le droit des brevets, conçues pour promouvoir le libre échange et réduire les prérogatives des gouvernements de favoriser leurs industries locales vis-à-vis de la concurrence étrangères. Ils se prononcent sur la manière dont les lois devraient être structurées, par ex. "pas de discrimination en faveur d'industries locales particulières", "pas de limitation arbitraire sur l'applicabilité". Ils encouragent ainsi deslimitation qui sont fondées sur des considérations systématiques, par ex. mettre dans la balance les droits des titulaires de brevets et d'autres droits de poids équivalent, comme la propriété du droit d'auteur (article 10 des ADPIC), la liberté de publication (article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme CEDH) ou le droit d'accès aux standards de communication.
Il est très important pour n'importe quel projet de loi sur les brevets de concrétiser les règles abstraites de l'accord sur les ADPIC. Tout projet de loi qui échouerait dans cette concrétisation ne peut prétendre servir un objectif de clarification.
Alors que les politiques économiques devraient être justifiées selon les termes des concepts abstraits inscrits dans les ADPIC, ils ne peuvent pas dériver uniquement des ADPIC.
C'est un bien pauvre travail de rédaction que de copier/coller les doctrines abstraites des ADPIC dans le lois européennes, qui sont supposées fournir des directions à un niveau plus concret. L'article 52(1) de la CBE a été revi et corrigé dans ce sens malavisé par la Conférence diplomatique de 2000 et le rapporteur du Parlement européen sur le projet de directive sur les brevets logiciels, la MPE Arlene McCarthy MEP, a proposé d'écrire directement l'article 30 des ADPIC dans l'article 6 bis de la directive. De tels actes ne font pas qu'obscurcir les lois proposées. Ils privent également l'Europe de marge de manoeuvre dans les futures négociations des ADPIC, ce qui pourrait bien être nécessaire pour éviter que le cadre des ADPIC ne soit plus du tout façonnable.
Les ADPIC ont été négociés par des délégations qui représentaient les intérêtes dominant d'une autre époque. Le logiciel était considéré comme non brevetable dans une grande majorité et le développement et la distribution de logiciels libres étaient pratiquement inconnus. Les ADPIC devraient être interprétés d'une manière qui ne profite pas à certaines techniques de productions, à certains modèles économiques et à certaines industries au dépend des autres. L'important est de renforcer la productivité dans toutes les industries.
Nombre de limites dans le systèmes des ADPIC, tout au moins dans ses interprétations plus rigides, sont devenues si manifestes que même les États-Unis, qui étaient les organisateurs en chef de l'accord sur les ADPIC, l'ont façonnéà leur avantage et ont ainsi, de manière soutenable, violé certaines de ses dispositions.
Il y a maintenant moins d'inquiétude à avoir quant à une plainte des USA à propos d'un quelconque aspect du système de brevets dans l'UE, car l'UE pourrait alors riposter en se pleignant de la préférence étasunienne dans le système de brevets des USA.
Tout jugement qui éclaterait sur le sujet risquerait fort d'ouvrir un nombre suffisant de questions politiquement épineuses des deux côtés de l'atlantique pour que personne ne veuille s'y lancer.
Les programmes d'ordinateur, tels que décrits dans des revendications de programmes accordées par l'OEB depuis 1988, sont des structures d'information, composées seulement d'entités symboliques. Le seul "caractère technique" qu'on peut y trouver ne se trouve que du côté des entités symboliques. On pourrait de même parler du "caractère technique" d'un ensemble de formules chimiques, d'un collection des dessins industriels ou même d'un roman de science-fiction et habiliter tout détenteur de brevet à monopoliser la distribution de toutes les informations qui décriraient son "invention".
Cependant, l'OEB ne va pas aussi loin que ça. Il crée plutôt une classe spéciale "d'inventions" qui peuvent être revendiquées sous forme de structures d'information. Ces structures, que depuis 2000 l'OEB appelle " inventions mises en oeuvre par ordinateur", peuvent être appropriées à la fois par es droitzs d'auteur et des brevets.
Les programmes d'ordinateur sont ainsi "protégés comme les oeuvres littéraires" (i.e. sujets au droit d'auteur), comme stipulé par l'article 10 des ADPIC et, en sus, brevetable comme des inventions techniques.
Ceci suffit à violer de manière soutenable les ADPIC. Normalement une réalisation intellectuelle ne devrait pas tomber sous les deux régimes en même temps. Et l'article 10 affirmer que les programmes d'ordinateur tombe sous le droit d'auteur. S'ils sont "protégés à la fois comme des oeuvres littéraires et comme des inventions", alors en pratique ils ne sont plus "protégés comme les oeuvres littéraires", puisque les ouvres sous le droit d'auteurs sont caractérisé par le fait que les idées qui les soutiennent doivent rester libres de parcours. Si à la fois le droit d'auteur et le brevet s'appliquent au logiciel, la propriété acquise par un régime s'expose àêtre dévaluée par l'autre.
L'OEB et la Commission européenne ont été encore plus loin dans le viol des ADPIC.
En partant de la création de la classe spéciale des "inventions mises en oeuvre par ordinateur" qui peuvent être revendiquées d'une manière particulière, habituellement non autorisée (à savoir sous la forme d'une structure d'information décrivant "l'invention"), ils se sont efforcés de créer un corpus de droits sui generis des brevets.
En 2000, la Commission européenne et l'OEB ont tous deux rapidement adopté les doctrines issues d'une nouvelle décision de la Chambre de recours de l'OEB, appelée Contrôle du sytème de caisses de retraite. Cette décision établit des règles particulières pour l'examen du caractère technique des "inventions mises en oeuvre par ordinateur", telles que l'évaluation de la "revendication dans son ensemble" plutôt que la réalisation derrière cette revendication, entraînant ainsi que tout programme d'ordinateur peut passer l'exigence d'invention technique, et, au lieu de cette exigence dénudée de sens, établissant une nouvelle exigence de "contribution technique dans l'activité inventive", qui n'a aucun fondement dans l'article 27 des ADPIC.
Le groupe de travail du Conseil de l'Union européenne a fait un pas de plus dans ses documents secrets de novembre 2002 et janvier 2004. Il a laissé décider ceux qui déposent des brevets lequel des deux régimes ils préféreraient voir appliquer à leur réalisation : les doctrines standards du droit des brevets ou les doctrines sui generis pour les "inventions mises en oeuvre par ordinateur".
À l'opposé, le Parlement européen a proposé de clarifier les ADPIC en affirmant, inter alia, que le traitement de données (l'informatique) n'est pas juste une autre discipline appliquée des sciences naturelles ("un domaine technique") mais plutôt un niveau d'abstraction, applicable à tous les champs des sciences naturelles, comme des sciences sociales. Ces clarifications intègrent superbement les articles 10 et 27 des ADPIC et la CBE. Les propositions du Parlement sont ignorées et discrédités sans raison valable par la communauté des administrateurs de brevets et des avocats des grosses entreprises, qui, au printemps 2004, continue de monopoliser les prises de décisions à l'Office européen des brevets, au Conseil de l'UE (Consilium) et à la Commission européenne (CEC).
En résumé, on peut dire que l'establishment européen des brevets :